Amélioration de l'accès aux soins et de l'utilisation des médicaments en Mauritanie

  • Amélioration de l'accès aux soins et de l'utilisation des médicaments en Mauritanie

En Mauritanie, l'objectif visé par le programme de santé "AIPASS" d'Enabel, financé par l’Union européenne, est de contribuer à la réduction de la pauvreté en permettant aux individus de vivre une vie saine et en promouvant le bien-être de tou.tes à tout âge. Plus précisément, il s'agit d'améliorer et de rendre l'accès aux soins de santé de qualité plus équitable, conformément aux objectifs du Plan National de Développement Sanitaire (PNDS) et de la Stratégie Nationale de Protection Sociale (SNPS).

La Mauritanie, comme beaucoup de pays en développement, fait face à des défis considérables en matière de santé publique. Les problèmes liés aux ruptures de stock de médicaments, l'utilisation irrationnelle des médicaments, et les difficultés d'accès aux soins de première ligne sont des obstacles majeurs qui entravent l'efficacité du système de santé. L’analyse effectuée par Enabel explore ces problématiques en se basant sur trois études récentes et propose des recommandations pour améliorer la situation.

1. Les ruptures de stock de médicaments
La première étude est une étude qualitative qui vise à identifier les principales causes des ruptures de stock de médicaments, un problème qui est devenu de plus en plus fréquent  en Mauritanie.
L'étude a été menée dans cinq districts de santé ainsi qu'aux niveaux régional et central. Les participants comprenaient des professionnels de la santé, des gestionnaires du CAMEC (Centrale d'Achat des Médicaments Essentiels et Consommables), du Département de la Pharmacie et du Laboratoire (DPL), et du Ministère de la Santé.
Les résultats de l'étude montrent que ces ruptures sont causées par une combinaison de 5 facteurs :

  • Capacité insuffisante des ressources humaines : nombre de personnels, formation et rétention.
  • Problèmes de communication et de coordination entre les parties prenantes.
  • Contraintes logistiques : transport et stockage.
  • Contraintes financières.
  • Prévision inadéquate des besoins et des procédures d'approvisionnement complexes.
Ces causes sont interconnectées et peuvent souvent être abordées localement par des solutions initiées et dirigées par les autorités mauritaniennes. L'étude suggère des actions pour remédier durablement aux ruptures de stock, y compris des réformes pour améliorer la gouvernance et la responsabilité du CAMEC et pour renforcer les différents piliers du système de santé et pharmaceutique local. La recherche a impliqué des entretiens individuels semi-structurés et des groupes de discussion, analysant les données pour fournir une compréhension commune et orienter les décideurs politiques vers des actions correctives.

2. Utilisation rationnelle des médicaments
La deuxième étude " Évaluation de l'utilisation rationnelle des médicaments basée sur les indicateurs de base de l'Organisation Mondiale de la Santé " est une étude transversale qui a été réalisée pour évaluer l'utilisation rationnelle des médicaments dans les établissements de santé publics et privés à but non lucratif en Mauritanie. Les indicateurs clés de cette étude incluent : 
  • Le nombre moyen de médicaments par ordonnance (2,21).
  • Les médicaments prescrits par nom générique (83,1 %).
  • Les médicaments sur la LNME, la liste nationale des médicaments essentiels (54%).
  • Les antibiotiques prescrits (62,4 % des consultations).
  • Les médicaments injectables prescrits (15,6 % des consultations).
  • Le temps moyen de consultation (16,32 minutes).
Les conclusions soulignent un excès de prescription d'antibiotiques et un manque de connaissance des directives thérapeutiques nationales. Les recommandations incluent la formation du personnel à l'utilisation rationnelle des médicaments et l'investigation des schémas de prescription par rapport aux directives spécifiques aux maladies. Mais aussi d’enquêter plus en détail sur les schémas de prescription par rapport aux directives thérapeutiques spécifiques aux maladies et d’investiguer qualitativement les facteurs contribuant à la prescription irrationnelle observée.

3. Accès difficile aux soins de première ligne
Cette troisième étude analyse l’offre et la demande de soins dans trois districts sanitaires (moughataas) : celui de Dar-Naim, de Sebkha et de Bababé.
Les résultats montrent des disparités significatives entre les zones urbaines et rurales :
  • Moughataa de Bababé : Ratio FoSa/population de 3,8/10 000 habitants.
  • Moughataa de Dar-Naim : Ratio FoSa/population de 0,6/10 000 habitants
  • Moughataa de Sebkha : Ratio FoSa/population de 0,3/10 000 habitants.
Le ratio FoSa/population fait référence à la proportion de Fournisseurs de Soins de Santé (FoSa) par rapport à la population totale. Le ratio FoSa/population est important, car il donne une idée de l'accessibilité des services de santé dans une région. Un ratio plus élevé signifie une meilleure disponibilité des soins de santé, tandis qu'un ratio plus faible peut indiquer des lacunes dans l'accès aux services de santé.

Démographie des participants : 61,4 % ont entre 15 et 59 ans, 77 % sont des femmes.
Les différences marquantes entre les moughataas urbaines et rurales suggèrent la nécessité d'une réorganisation des soins primaires en deux modèles adaptés (rural et urbain). Ces modèles doivent inclure un plan de couverture pour optimiser l'offre de soins, améliorer le circuit des patients, et minimiser les disparités d'accès aux soins.

Suggestions pour les deux modèles :
  • Décentralisation des compétences.
  • Référence et contre-référence des patients.
  • Plan de couverture pour guider l'implantation des FoSa.
En résumé, l'étude recommande des ajustements spécifiques pour améliorer l'accès aux soins de première ligne, en tenant compte des particularités des zones urbaines et rurales. Les pathologies respiratoires et gastro-intestinales sont les motifs de consultation les plus fréquents. L'étude recommande une réorganisation des soins primaires avec des modèles adaptés aux zones rurales et urbaines, incluant la décentralisation des compétences et un plan de couverture pour optimiser l'offre de soins.

Les défis de la santé publique en Mauritanie sont complexes et interconnectés. Les solutions doivent être globales et inclure des améliorations dans la gestion des stocks de médicaments, l'utilisation rationnelle des médicaments, et l'accès aux soins de première ligne. Une approche intégrée, tenant compte des spécificités locales, est essentielle pour renforcer le système de santé et garantir un meilleur accès aux soins pour tous les Mauritaniens.

Le projet AIPASS contribue à améliorer l'accès aux services de santé pour la population mauritanienne, tout en renforçant les capacités institutionnelles du ministère de la Santé pour une gestion plus efficace et durable du système de santé
. Nous pouvons dire que notre programme progresse de manière significative vers la réalisation de cet objectif, contribuant ainsi à la réduction de la pauvreté et à l'amélioration du bien-être pour tous en Mauritanie.

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